Depuis sa création en 2019, Multiverse Computing impressionne sur le marché de l’informatique quantique. Grâce à sa forte croissance, cette start-up espagnole a ouvert des bureaux à l’étranger, notamment à Toronto au Canada, ainsi qu’à Palaiseau en région Île-de-France.

Multiverse Computing propose toute une gamme de services algorithmiques basés sur la physique quantique adaptés aux besoins de secteurs spécifiques, de la finance à la fabrication, en passant par l’énergie et le développement durable. Par exemple, dans ce dernier domaine, la société cherche à développer de nouvelles solutions innovantes pour lutter contre le changement climatique grâce aux technologies quantiques.

Nous souhaitions en savoir plus sur les logiciels d’informatique quantique de Multiverse Computing. Nous nous sommes donc entretenus avec le directeur de la filiale française, Michel Kurek, qui nous a parlé des projets actuels et futurs que la société mène en région Île-de-France. Cet entretien aborde aussi le recrutement par Multiverse Computing des talents de la région, sa collaboration avec de grands centres de R&D tels que Paris-Saclay et son engagement pour le développement de solutions durables grâce à l’informatique quantique.

Pouvez-vous nous présenter Multiverse Computing et votre rôle au sein de cette entreprise ?

Multiverse Computing SL est une start-up espagnole de la DeepTech fondée en 2019 et spécialisée dans les logiciels d’informatique quantique. La filiale française a ouvert en 2021.
Dès que la technologie sera suffisamment développée, les ordinateurs quantiques pourraient effectuer, grâce à l’exploitation des concepts des technologies quantiques, des calculs qui ne seraient pas réalisables avec des superordinateurs standard.

Pour l’heure, Multiverse Computing se positionne comme un acteur clé de ce domaine en proposant des solutions novatrices ses clients issus de secteurs très divers. En tant que directeur de la filiale français, mon rôle est d’intégrer la société dans l’écosystème national (réseaux d’entreprise, relations académiques) et de la développer sur le plan du personnel et du chiffre d’affaires. Je contribue également au développement international du groupe par la mise en place d’un centre de R&D de proximité.

Selon vous, quelles sont les qualités essentielles à avoir pour occuper votre poste ou, en général, pour occuper un poste de directeur général national ?

Pour commencer, je dirais qu’il faut bien connaître le pays et avoir envie d’apprendre. Un directeur national doit être capable de s’adapter à des situations qui évoluent très rapidement, en particulier s’il travaille dans un secteur porté par une politique publique proactive, comme c’est le cas pour la DeepTech.

Il est par ailleurs également important de savoir se créer un réseau et, bien évidemment, de communiquer correctement, surtout dans un pays qui n’est pas votre pays d’origine.

Quelles raisons vous ont poussé à vous développer en Île-de-France ? Pourquoi avoir choisi cette région et pas une autre ?

Depuis l’annonce de son plan quantique en janvier 2021, la France s’est positionnée afin de devenir l’un des principaux acteurs dans le domaine des technologies quantiques. Cet engagement public de la France, ses atouts remarquables (compétences et excellence scientifique) et son écosystème industriel prolifique nous ont convaincus de développer les activités de Multiverse Computing dans ce pays.

D’ailleurs, Paris-Saclay est au cœur du plan quantique français, car il jouit de nombreux laboratoires, « grandes écoles », start-ups et centres de R&D publics et privés. Autre facteur déterminant pour le développement commercial de notre start-up, la région Île-de-France génère à elle seule près de 31 % du PIB de la France.

Les technologies numériques et l’innovation deviennent peu à peu des leviers pour atteindre une meilleure qualité de vie. Comment Multiverse Computing s’y prend-elle pour améliorer la durabilité grâce à la technologique quantique ? Quelles sont les principales difficultés de cette recherche ?

Les importants progrès réalisés en informatique quantique permettent l’exploration de multiples applications prometteuses en science des matériaux, pharmaceutique, logistique et de nombreux autres secteurs. Les technologies quantiques pourraient contribuer à atteindre des objectifs de développement durable, en ayant par exemple un impact positif sur l’environnement en réduisant les causes du changement climatique.

Chez Multiverse Computing, nous explorons déjà le point de convergence entre informatique quantique et durabilité dans plusieurs projets pour le secteur de l’énergie ou la finance durable, pour n’en citer que quelques-uns.

Hormis la difficulté technologique actuelle à améliorer la qualité des ordinateurs quantiques, je mentionnerais deux autres problématiques pour le secteur de l’informatique quantique mondiale. La première problématique concerne le « benchmarking », c’est-à-dire la comparaison des solutions quantiques entre elles et par rapport à des solutions conventionnelles, le cas échéant. Par exemple, nous entendons souvent dire qu’un ordinateur quantique consomme moins d’énergie qu’un superordinateur conventionnel, mais est-ce vraiment le cas ?

La deuxième problématique porte sur la question de l’éthique de l’informatique quantique. Pour atteindre les objectifs de durabilité, certaines mesures doivent être prises, en particulier en matière d’égalité de genre, de paix et d’accessibilité des technologies aux pays plus pauvres. Les enjeux sont importants, car l’innovation résulte de plus en plus de la diversité.

Quels sont vos projets en région Île-de-France ?

Multiverse Computing a commencé en fournissant des solutions à des problèmes complexes d’optimisation et de machine learning au secteur financier grâce à des méthodes dérivées du traitement d’informations quantiques. Les solutions utilisées peuvent être appliquées à de nombreux autres secteurs, et c’est dans cette optique que nous ouvrons un nouveau centre de R&D à Paris dédié à ces nouvelles intégrations verticales (énergie, cybersécurité, industrie 4.0, etc.).

De plus, notre objectif est de participer aux écosystèmes académiques et industriels (grands groupes et start-ups) et de développer une base de clients commerciaux nationaux. Notre objectif est de contribuer à l’influence régionale, et même européenne dans le domaine des logiciels quantiques. Malgré la concurrence mondiale, nous devons éviter les échecs que nous avons connus dans le domaine de l’intelligence artificielle, par exemple.

Selon vous, quels sont les atouts de la région et de Paris-Saclay ?

L’Opération d’intérêt national Paris-Saclay est un projet exceptionnel qui définit un cadre structurant pour la région Île-de-France. Gage de son dynamisme, Paris-Saclay est même devenu un cluster mondial scientifique, technologique et académique (rassemblant 15 % de la R&D française et reconnu comme l’un des 8 principaux pôles mondiaux pour la recherche et l’innovation).

Les technologies quantiques sont par nature interdisciplinaires, et l’accès aux talents est considéré comme une problématique majeure pour le futur de ce domaine. En réponse à cet enjeu, Paris-Saclay propose un cadre remarquablement divers au sein de ses établissements d’enseignement (Université Paris-Saclay, IP Paris) et des relations souples entre la recherche (étudiants, laboratoires), les industriels et les start-ups.

En quoi l’impressionnant écosystème de start-ups de la région Île-de-France a-t-il aidé Multiverse Computing ? Quel type de collaborations avez-vous mis en place à ce jour ?

Dès que nous sommes arrivés à Paris, nous avons rejoint la communauté French Tech Paris-Saclay, ainsi que le pôle de compétitivité DeepTech Systematic Paris-Region, au sein duquel nous contribuons à l’élaboration de la feuille de route quantique 2022.

Nous avons également pris contact avec la chaire « Technology for Change » de l’Institut Polytechnique de Paris, où nous menons des campagnes de sensibilisation sur des questions quantiques. Par ailleurs, nous échangeons déjà avec de nombreux industriels et start-ups de la région pour créer des synergies prometteuses.

Pour finir, comment décririez-vous la région Île-de-France en 3 mots ?

Interdisciplinaire, flexibilité, durabilité.